jeudi 23 janvier 2014

Faut-il abréger les souffrances de certains malades ?

Daniel Boyer, aujourd’hui retraité à Ambleny, a travaillé pendant plus de quarante ans en tant qu’infirmier dans différents hôpitaux et services de fin de vie, y compris l’hospitalisation à domicile. Pour lui, il y a des situations où il faudrait abréger les souffrances des malades.
Qu’est-ce qui vous a amené à réagir aujourd’hui ?

Je m’interroge sur la réaction des parents de Vincent Lambert, qui se positionnent contre la décision collégiale des médecins qui ont demandé d’arrêter les traitements (de nutrition et d’hydratation artificielles, NDLR). Si les parents aimaient vraiment leurs enfants, ils les laisseraient partir. C’est une vraie preuve d’amour que de laisser partir celui qui souffre. Par ailleurs, je ne vois pas ce que la justice vient faire dans cette affaire. C’est quelque chose qui devrait se régler entre la famille et les médecins.

Avez-vous été confronté pendant votre carrière à des cas similaires à celui de Vincent Lambert ?

Combien de fois j’ai entendu des gens me dire : « Si le bon dieu pouvait me rappeler » ou « Qu’est-ce que j’ai fait pour subir tout ce que je subis. » Quand vous voyez des gens en fin de vie sondés de partout avec des perfusions, vous vous posez vraiment la question. Je pense à une dame d’une soixantaine d’années atteinte d’un cancer du visage. Elle n’arrêtait pas de se regarder dans la glace… Elle voulait partir, elle était dévorée par son cancer. C’était épouvantable, c’était presque à qui n’irait pas dans la chambre. Certains membres de sa famille auraient bien voulu que cette personne s’en aille mais tout le monde n’était pas d’accord. Ils disaient qu’elle finirait bien par mourir de son cancer.Avez-vous déjà été amené à prendre des décisions face à la souffrance des patients ?

Je ne pourrais pas dire qu’on ne les a pas un petit peu aidés. Je ne peux pas dire les médecins ont fait quelque chose, mais il est arrivé qu’on augmente les doses de morphine de façon à ce que la personne s’endorme. Disons-le comme ça. À ce moment-là, vu les souffrances qu’endurait le malade, il est arrivé que la famille n’ait pas le droit de donner son avis. Si certains parents étaient avec leur enfant, 24 heures sur 24, chaque seconde, je suis sûr à 90 % qu’ils diraient qu’on peut laisser partir leur enfant.

Selon vous, que faudrait-il faire ?

Je ne laisserais pas faire les choses surtout à l’époque où on vit maintenant. Nous avons les moyens aujourd’hui de soulager les gens, et de les laisser partir sans qu’ils ne souffrent trop. Il devrait y avoir une loi pour les cas de patients où il n’y a plus d’espoir et pour les cancers en phase terminale. Il faudrait une loi qui encadre mieux ces situations.

Que pensez-vous du formulaire de directives anticipées ?

Ce formulaire n’est valable que trois ans. C’est ridicule. Il ne faudrait pas qu’il y ait de limitation. À partir du moment où on l’a dit et où on ne revient pas dessus, la déclaration ne doit pas être modifiée. Il faudrait que chacun d’entre nous puisse décider s’il est d’accord ou non avec l’acharnement thérapeutique. Et que cela soit noté quelque part.
Pour se procurer le formulaire des directives anticipées, se rendre sur le site de l’ADMD.

http://www.lunion.presse.fr/region/faut-il-abreger-les-souffrances-de-certains-malades-ia3b26n286561

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