, Musée Saint-Léger, du 28 octobre 2017 au 11 mars 2018.
Soissons a un musée des Beaux-Arts. Avouons que celui-ci, depuis de nombreuses années, était passé sous le niveau des radars et que bien peu s’en rappelaient. Grâce à l’exposition « Heures Italiennes » organisée l’année dernière (voir l’article), beaucoup avaient pu découvrir ses deux chefs-d’œuvres de Pellegrini qu’il conserve. Celui-ci a voulu accompagner l’événement en présentant à son tour une petite exposition autour de deux tableaux italiens de son fonds, et grâce à des prêts extérieurs importants. Une occasion de se rendre à Soissons et de découvrir ce musée où il reste tout à faire.
L’exposition s’intitule « La Grande Bouffe », en référence bien sûr au film de Marco Ferreri. Une salle est d’ailleurs dédiée à l’évocation de quelques films tournant autour du sujet de la représentation caricaturale des repas, car c’est de cela qu’il s’agit ici, essentiellement donc de la peinture italienne des XVIe et XVIIe siècles.
Tout est parti de la redécouverte dans les collections d’un tableau représentant une Scène bachique (ill. 1). Redécouverte car ce tableau était inventorié, mais son intérêt n’était pas apparu jusqu’à ce que l’équipe du Retif (le répertoire des tableaux italiens dans les musées français) l’ait étudié. Alors attribué à l’entourage de Bartolomeo Passarotti, peintre bolonais, il fut rendu à cette occasion plutôt à celui du vénitien Niccolò Frangipane.
Tout est parti de la redécouverte dans les collections d’un tableau représentant une Scène bachique (ill. 1). Redécouverte car ce tableau était inventorié, mais son intérêt n’était pas apparu jusqu’à ce que l’équipe du Retif (le répertoire des tableaux italiens dans les musées français) l’ait étudié. Alors attribué à l’entourage de Bartolomeo Passarotti, peintre bolonais, il fut rendu à cette occasion plutôt à celui du vénitien Niccolò Frangipane.
L’œuvre appartient à un genre bien précis, défini à la fin du XVIe siècle par le cardinal Paleotti, celui des pitture ridicole, « peintures ridicules » dont le but, par une représentation caricaturale des personnages, est de provoquer le rire du spectateur. Ce type de tableaux, comme le démontre l’exposition, se développa en Italie dans trois foyers différents : en Vénétie, comme cette Scène bachique de Frangipane, avec des modèles dont l’origine peut être trouvée chez Giorgione qui fit aussi - avec, bien sûr, des qualités artistiques tout autre - quelques œuvres caricaturales. En Lombardie également autour des Campi, notamment de Vicenzo Campi, et enfin à Bologne avec Bartolomeo Passarotti et ses suiveurs. Bien sûr, il n’y avait pas de solution de continuité entre ces trois foyers qui interagissaient entre eux.
Si le tableau du cercle de Frangipane est d’une qualité très moyenne, d’autres toiles présentées à Soissons démontrent que ce genre pouvait également produire des peintures d’excellente facture. C’est le cas de celui de Passarotti (ill. 2) de la collection de Pierre Rosenberg (une œuvre donc promise aux Andelys), qui eut un grand succès dans la Bologne de l’époque et qui passe pour avoir marqué Annibale Carracci dont le Mangeur de fèves peut être considéré comme d’une veine proche. La volonté de ridiculiser les participants à ce banquet se double d’allusions allégoriques, notamment sexuelles comme le saucisson et les gousses d’ail d’une part, faisant allusion au sexe masculin, et les figues ouvertes qui évoquent le sexe féminin.
Les tableaux de Vincenzo Campi - trois sont ici exposés - relèvent du même esprit. Comme pour Passarotti, et contrairement à Frangipane qui reste un artiste médiocre, on a affaire ici à un bon peintre dont les figures sont remarquablement exécutées. Il faut signaler une attribution toute récente, encore une redécouverte due cette fois à une campagne de restauration qui a permis de révéler la signature du peintre et la date de 1579. Il s’agit d’un tableau représentant un étal de poissonnier appartenant au Musée de La Roche-sur-Yon (ill. 3), qui lui a été légué en 1973. Comme le fait remarquer la notice du catalogue, l’œuvre s’inspire nettement de la peinture flamande, notamment de Joachim Beuckelaer dont Campi pouvait avoir connaissance par l’intermédiaire de la collection Farnese.
On recommandera, pour conclure, la lecture du petit catalogue qui accompagne cette exposition et où plusieurs auteurs étudient de manière très approfondie ce sous-genre de la peinture de genre jusqu’à présent mieux connu dans l’art nordique que dans la peinture italienne.
Commissaires : Sophie Laroche et Christophe Brouard.
Informations pratiques : Musée Saint-Léger, 2 rue de la Congrégation, 02200 Soissons. Tél : 03 23 93 30 50. Ouvert tous les jours sauf le lundi, du mardi au vendredi : 9 h-12 h et 14 h-17 h. Samedi, dimanche et jours fériés : 14 h-17 h. Tarifs : 2 € (réduit : 1 €).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire