Elle est morte dans mes bras. » A 93 ans, Georgina Aberton, « Pierrette » pour la Résistance, se souvient avec émoi de Raymonde Fiolet, alias « Roberte », son amie d’enfance, sa camarade. La famille de cette Italienne, née à Turin en 1921, s’était installée à Soissons. Georgina Aberton, a d’abord fréquenté la jeune soeur de Raymonde Fiolet, puis l’aînée : « Elles habitaient route de Château-Thierry. Leur mère tenait un café. »Adolescente, Georgina Aberton s’est intéressée à la politique, comme sa grande voisine. Elles se sont rapprochées : « Je partageais ses idéaux. Du temps du Front populaire, j’ai même assisté à un discours de Léon Blum dans la salle des Feuillants. Même s’il n’était pas communiste, ça m’avait marqué. » Puis Raymonde Fiolet est partie. Les deux amies se sont retrouvées vers 1943-1944. Devenue « Roberte », Fiolet s’était engagée dans la Résistance en 1940. Elle dirigeait les 600 hommes du réseau Libération-Nord. Parmi eux, le mari de Georgina Aberton, Albert, et son beau-frère. « Les réunions se tenaient chez nous, dans notre cave. » Malgré la naissance d’un premier garçon, « Pierrette » a servi d’agent de liaison. Elle a porté des messages à Villers-Cotterêts ou Fère-en-Tardenois.
Et puis il y a eu ce soir de juin 1944. Hitler visitait son QG de Margival. Les nazis voulaient frapper un grand coup. « Roberte » et plusieurs résistants ont été arrêtés par les SS. « Ils nous ont fait sortir en pleine nuit. J’avais mon fils de 13 mois dans les bras. J’ai cru qu’ils allaient m’emmener avec eux. Ils m’ont laissé toute seule, devant la maison. Mon mari a été exécuté sur le chemin et mon beau-frère est mort en déportation. »
Georgina Aberton a poursuivi la lutte. Dans le maquis de Missy-aux-Bois, elle a rencontré une autre Soissonnaise, Geneviève Bouchel. « A la Libération, Raymonde a été nommée maire, et Geneviève est devenue sa secrétaire. » Les Allemands partis, les trois femmes se sont retrouvées. Le rôle d’édile allait comme un gant à Mme Fiolet, mais la mort guettait. « Elle était chétive, fragile. »
En février 1946 « Roberte » a disparu. Définitivement.
http://www.lunion.presse.fr/accueil/a-soissons-la-resistance-se-conjuguait-au-feminin-ia0b0n399079
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